Simone Veil : Une vie au service de la justice, des droits des femmes et de l'Europe

Simone Jacob est née le 13 juillet 1927 à Nice. Fille d'un architecte et d'une mère au foyer, elle est la benjamine d'une fratrie de quatre enfants.

Une jeunesse marquée par la guerre et la déportation

Issue d'une famille juive, son adolescence est marquée par les tourments de la Seconde Guerre Mondiale. Après l’offensive allemande en 1940 et l’armistice, le statut des Juifs est bientôt promulgué, et André Jacob, père de Simone, se voit retirer le droit d’exercer son métier d’architecte. Élève douée, elle décroche néanmoins son baccalauréat en mars 1944. Le 29 mars 1944, Simone Jacob passe les épreuves du baccalauréat. Le lendemain, elle est arrêtée par la Gestapo. Elle transitera par le camp de Drancy avant d’être déportée à Auschwitz-Birkenau, où elle arrive le 15 avril 1944. Simone est âgée de 16 ans lorsqu'elle est arrêtée le 30 mars 1944 à Nice à l'occasion d'un contrôle de rue, malgré son nom d'emprunt, Simone Jacquier. Elle est conduite à l'hôtel Excelsior qui servait de lieu de rassemblement des juifs avant leur départ vers l'Allemagne.

Transférée au camp de Bergen-Belsen, elle travaille à la cuisine. En avril 1945, le camp est libéré par les troupes alliées anglaises. De retour en France le 23 mai 1945, une date que Simone n’oubliera jamais, elle apprend qu’elle a été reçue aux épreuves du baccalauréat passées la veille de son arrestation. Elle décide alors de s’inscrire à la faculté de droit, comme elle l’avait toujours voulu, et entre parallèlement au nouvel Institut d’études politiques, rue Saint-Guillaume.

Simone Jacob retrouve la France en mai 1945 et choisit de taire les souvenirs de cette jeunesse en déportation. C’est ensuite et surtout la grande tragédie de sa vie, la déportation en camp de concentration, qu’aborde ce même épisode. Ce témoignage est l’un des premiers à évoquer ces « Marches de la mort », à cette époque encore peu abordées par l’historiographie sur la Shoah. Au cours des derniers mois de la guerre, entre janvier et mai 1945, les marches forcées destinées à évacuer les principaux camps de concentration et de mise à mort avant l’arrivée des Alliés se font désormais majoritairement à pied ou par wagons à ciel ouvert et s’inscrivent dans un contexte de brutalité extrême. Si Simone Jacob et sa sœur Madeleine survivent à cette marche, leur mère contracte le typhus et meurt en mars 1945 à Bergen-Belsen.

Dans son autobiographie, Une vie, publiée chez Stock en 2007, Simone Veil écrit, à propos de ces trois dates, profondément ancrées en elle :

Lire aussi: Gérer la gastro-entérite chez un enfant de 3 ans

« Elles constituent les points de repère de ma vie. Je peux oublier beaucoup de choses, mais pas ces dates. Elles demeurent attachées à mon être le plus profond, comme le tatouage 78651 sur la peau de mon bras gauche. »

Études, mariage et début de carrière

Après la Libération, elle reprend de brillantes études et décroche une Licence de droit et intègre l'Institut d'Etudes Politiques de Paris. C’est là qu’elle rencontre Antoine Veil, tout juste démobilisé. Issu d’une famille qui évoque par bien des côtés celle que Simone a perdue - « des Juifs non religieux, profondément cultivés, amoureux de la France » -, elle se marie avec Antoine Veil le 16 octobre 1946. Simone Jacob épouse Antoine Veil en 1946 et entame des études de droit. Elle entame une carrière dans la magistrature attachée à la direction de l'administration pénitentiaire du ministère de la Justice. En 1957, elle est reçue au concours de la magistrature. Puis elle devient en 1969 conseillère technique dans le cabinet du ministre de la Justice. En 1970, Simone Veil est nommée Secrétaire générale du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Elle est la première femme à occuper ce poste.

Ministre de la Santé et la loi sur l'IVG

Après l'élection de Valéry Giscard d'Estaing à la présidence de la République en 1974, Simone Veil amorce un tournant politique dans sa carrière. Le 28 mai 1974, elle est nommée ministre de la Santé dans le gouvernement de Jacques Chirac. Elle conserve ce ministère sous les trois gouvernements de Raymond Barre jusqu'en 1979. Dès le premier Conseil des ministres, le sujet de la légalisation de l’interruption volontaire de grossesse est abordé par le Président Giscard d’Estaing. C’est Simone Veil qui est chargée de faire adopter le projet de loi. Un dossier très délicat.

Face à une ligue de parlementaires réactionnaires, elle libéralise l'accès à la contraception et défend l'interruption volontaire de grossesse (IVG). À ce titre, elle fait adopter une loi généralisant l’usage de la pilule, qui permet son remboursement par la Sécurité sociale et son accès gratuit pour les mineures. Simone Veil s’attelle ensuite au grand chantier de son ministère : la préparation du projet de loi visant à libéraliser l’avortement. Portée par le mouvement féministe et soutenue par l’engagement à ses côtés du ministre de l’Intérieur, Michel Poniatowski, Simone Veil affronte les attaques. Suite à une grève de l’ORTF, les programmes ayant été annulés, les débats de l’Assemblée sont retransmis en direct par les grévistes. Suivent trois jours de discussions parfois violentes. La loi est finalement votée dans la nuit du 29 novembre 1974. Après son adoption par l’Assemblée nationale, le projet est approuvé par le Sénat. Le 17 janvier 1975, la loi est autorisée pour cinq ans. Ce combat lui confère une aura symbolique.

La loi prévoit que : « la femme enceinte que son état place dans une situation de détresse peut demander à un médecin l’interruption de sa grossesse.

Lire aussi: Vie privée de Charles de Gaulle et ses enfants

Jean Veil, son fils, a déclaré : "Elle a commencé son discours en rappelant que l’avortement constituait un drame et qu’il le resterait toujours. C’est le cas."

Présidente du Parlement européen et autres fonctions gouvernementales

En juin 1979, elle est élue député au Parlement européen et quitte le gouvernement. Elle devient la première femme à accéder à la présidence du Parlement européen (1979-1982). Après ces cinq années passées au ministère de la Santé, s’ouvre ensuite pour Simone Veil l’important épisode européen. La construction européenne est à ses yeux le seul moyen d’éviter les horreurs du passé. Le président Giscard d’Estaing lui propose de porter les couleurs de l’UDF aux premières élections du Parlement européen au suffrage universel, le 10 juin 1979. C’est son baptême électoral - un baptême victorieux : sa liste arrive largement en tête. Valéry Giscard d’Estaing soutient alors la candidature de Simone Veil à la présidence du Parlement européen, y percevant un symbole fort de la réconciliation franco-allemande et de la construction européenne. Élue le 17 juillet 1979 présidente du Parlement européen par 192 voix - trois voix de plus que la majorité absolue -, Simone Veil devient citoyenne de l’Europe au niveau le plus élevé, poste qu’elle occupe pour trente mois, jusqu’en janvier 1982. Simone Veil mène la liste UDF aux premières élections au suffrage universel direct du Parlement européen, en 1979. Après la victoire de sa liste, elle est élue présidente par la nouvelle assemblée le 17 juin 1979. C'est, là encore, la première femme à occuper ce poste.

En 1993, elle quitte son mandat européen et rejoint à nouveau le gouvernement. Le 30 mars 1993, elle est nommée Ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville dans le gouvernement d'Edouard Balladur. Elle accepte, et lui demande d’adjoindre à ses fonctions celles du ministère de la Ville, s’attaquant de front, pendant deux ans, au déficit de la Sécurité sociale et aux quartiers difficiles.

Conseil Constitutionnel et engagement pour la mémoire de la Shoah

Simone Veil est membre du Conseil Constitutionnel (1998-2007). De 1998 à 2007, Simone Veil achève sa carrière au Conseil constitutionnel où elle est nommée par René Monory, président du Sénat, pour un bail de neuf ans. Durant le temps où elle y siège, le problème de la primauté du droit communautaire sur la législation française est longuement débattu. Parallèlement, elle poursuit son devoir de mémoire et préside la Fondation pour la mémoire de la Shoah (2000-2007). Depuis 2007, elle est présidente d'honneur de la Fondation. Une part du budget est consacrée au musée du Mémorial, qui abrite à la fois le mur des Déportés et le mur des Justes. Tout au long de sa vie, Simone Veil n’aura de cesse de travailler à ce que vive le souvenir de la déportation des Juifs. Elle participe aux commémorations, témoigne à la radio et à la télévision, et répond aux questions des écoliers. L’INA dévoile un document jamais publié de l'ancienne ministre : un enregistrement de 5 h 30 réalisé en 2006 avec la Fondation pour la Mémoire de la Shoah et dans lequel elle revient sur sa vie, sa déportation et sa carrière.

Académie française et Hommages

Élue en 2008 à l’Académie française au fauteuil n° 13 qui fut celui de Paul Claudel, de Pierre Loti et de Pierre Messmer, mais aussi celui de Jean Racine, Simone Veil entre sous la Coupole le 18 mars 2010. Sur son épée d’académicienne est gravé son numéro de déportée.

Lire aussi: Enfants de Brando : Secrets et drames

Simone Veil meurt à son domicile parisien de la place Vauban le 30 juin 2017, à quelques jours de son 90e anniversaire. Sa mort, survenue le 30 juin 2017, à l’âge de 89 ans, bouleverse les Français. Le 1er juillet 2018, la cérémonie d’entrée au Panthéon de Simone Veil et de son mari, Antoine, rassemble des milliers de personnes. Après le passage de leurs cercueils devant des photographies représentant le parcours de Simone Veil, Emmanuel Macron, président de la République, prononce un discours d’hommage.

Vie privée et famille

Côté vie privée, elle épouse Antoine Veil en 1946. Elle décide alors de s’inscrire à la faculté de droit, comme elle l’avait toujours voulu, et entre parallèlement au nouvel Institut d’études politiques, rue Saint-Guillaume. C’est là qu’elle rencontre Antoine Veil, tout juste démobilisé. Issu d’une famille qui évoque par bien des côtés celle que Simone a perdue - « des Juifs non religieux, profondément cultivés, amoureux de la France » -, elle se marie avec Antoine Veil le 16 octobre 1946. Le couple a trois enfants; Jean (1947), Claude-Nicolas (né en 1948-2002) et Pierre-François (1954). Antoine Veil est décédé en avril 2013.

Porteuse de la loi sur l’interruption volontaire de grossesse, Européenne convaincue, Simone Veil s’est éteinte le 30 juin 2017, à l’âge de 89 ans.

Tableau récapitulatif des fonctions et mandats de Simone Veil

tags: #enfants #de #simone #veil #biographie