Jordan Bardella : Enfance et Origines d'une Figure Politique Montante
Jordan Bardella est la nouvelle tête de liste du parti d'extrême-droite Rassemblement national. Cependant, il reste une figure assez mystérieuse. Il reste discret sur sa vie privée, plus particulièrement sur ses parents, issus de l'immigration.
D'où vient vraiment Jordan Bardella ?
Voici tout ce que vous devez savoir.
Une enfance en Seine-Saint-Denis
Jordan Bardella est né le 13 septembre 1995 à Drancy, en Seine-Saint-Denis. Enfant unique, son père Olivier est patron d'une PME spécialisée dans les distributeurs automatiques de boissons, et sa mère Luisa est agente territoriale spécialisée dans les écoles maternelles.
Les trois quarts de sa famille sont d'origine italienne, et sa grand-mère maternelle est d'origine algérienne kabyle. Sa famille maternelle a quitté l'Italie dans les années 1960. D'après Le Monde : "Jordan Bardella se présente volontiers comme 'un enfant de l'immigration', un Français de sang-mêlé, à 75 % italien".
Ses parents se séparent lorsqu'il est encore un jeune enfant, et il grandit en garde partagée entre un HLM de sa ville natale, Drancy, lorsqu'il est chez sa mère, et dans un quartier favorisé de Montmorency les week-ends et la moitié des vacances scolaires lorsqu'il est chez son père.
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Jordan Bardella a raconté à Envoyé Spécial les souvenirs les plus marquants de son enfance : "Les fins de mois difficiles, je connais ça parce que j'ai vu ma mère avoir du mal à finir le mois, toute sa vie, toute mon enfance. J'ai vu ça pendant vingt ans".
Études et Premiers Engagements
Alors qu'il étudie au lycée privé Jean-Baptiste-de-La-Salle à Saint-Denis, il effectue un emploi étudiant plutôt surprenant, lorsque l'on connaît la suite de son parcours professionnel en politique. En effet, d'après plusieurs anciens camarades de classe, il donne bénévolement des cours de français à des migrants, dans le cadre de son engagement avec l'association Alfaccueil.
Il sort du lycée avec un baccalauréat Économique et Social, et il est même décoré d'une mention très bien. Il travaille ensuite quelque temps dans l'entreprise de son père avant de débuter son parcours politique, son seul véritable métier avant de devenir homme politique.
Après ses études au lycée, il passe le concours d'entrée à l'Institut d'études politiques de Paris, qu'il échoue à cause notamment d'une question sur la guerre d'Algérie. Il se lance alors dans une licence de géographie à l'université Paris-IV Sorbonne, qu'il abandonne ensuite pour se concentrer sur son engagement au sein du Front National, auquel il a adhéré en 2012 alors qu'il n'avait que 17 ans.
Débuts Politiques et Ascension au sein du Rassemblement National
Né en 1995 à Drancy d’un père patron de PME et d’une mère ATSEM (agente territoriale spécialisée des écoles maternelles), Jordan Bardella, d'origine italienne et franco-algérienne, grandit en Seine-Saint-Denis. C’est dans ce même département d'Île-de-France qu’il débute alors sa carrière au Front national. Encarté au parti dès l’âge de 16 ans, il est vite remarqué grâce à sa posture propre et maitrisée.
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Toujours en costume-cravate, Jordan Bardella incarne alors une image lisse du parti, séduisant Florian Philippot d’abord, Marine Le Pen ensuite. Pierre-Stéphane Fort rappelle que les parents de Jordan Bardella ont divorcé lorsqu'il était jeune, d'où la "recherche d'abord d'autorité, parce que son père n'était pas très présent dans sa vie quotidienne, et d'un cadre pour grandir".
Pierre-Stéphane Fort remarque aussi un besoin de considération, notamment par la communication. Mais il n'apparaissait pas comme quelqu'un d'extraverti pour autant : "Même à 16-17 ans, il ne se livrait jamais ; il avait, dès le plus jeune âge, appris par cœur les éléments de langage du parti et la ligne mariniste".
Dans le même temps, l'animal politique apparaît : "Très jeune, il a compris que pour faire carrière au Front National, il fallait bien se présenter et coller à la ligne mariniste". C'est une époque où la stratégie de dédiabolisation du parti commence à peine. Il suit donc les conseils de Florian Philippot, numéro deux du parti à l'époque, qui indique que des places sont disponibles pour des "jeunes loups présentables" . Jordan Bardella joue le jeu à merveille :"Il a toujours présenté un visage extrêmement lisse et sans dérapage".
La Stratégie du Récit de Soi
Le récit d'une enfance passée dans une cité de Seine-Saint-Denis, d'un garçon élevé par sa mère aux revenus modestes, occulte une partie de ses origines : "Il parle très peu, voire jamais, du rôle de son père, qui était chef d'entreprise et qui a contribué notamment financièrement à son éducation. Jordan Bardella, il a fait toute sa scolarité dans le privé, dans des établissements catholiques assez préservés".
L'idée d'insister sur cette enfance passée dans une cité vient de l'ancien coach médiatique de Jordan Bardella, Pascal Humeau, qui y voyait l'opportunité de légitimer son discours sur le fantasme de submersion migratoire, porté par le Rassemblement national. Pour Pierre-Stéphane Fort, Jordan Bardella représente l'autre face du parti, celle que Marine Le Pen peinait à incarner : son prénom, Jordan, "parle aux classes populaires et est donc un atout électoral pour son parti".
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Mais pas que ! Jordan Bardella adapte bien sûr son discours à son auditoire. Gendre idéal aux cheveux gominés un jour, il sait aussi passer pour un jeune urbain détendu, baskets chaussées et sweatshirt revêtu, pour rencontrer des journalistes qu'il considère être de gauche.
"Ce que je cherche" : Révélations sur sa Jeunesse
Dans son ouvrage, Ce que je cherche, Jordan Bardella se livre sur sa jeunesse dans la cité Gabriel Péri (Saint-Denis) et se souvient de cette "règle d'or" imposée par sa mère. Et c'est dans des bâtiments "recouverts de tags hostiles à la police" au sein d’une banlieue "désertée par un État réduit à l’impuissance" que le protégé de Marine Le Pen a vécu une bonne partie de son adolescence.
Sa mère, Luisa, lui avait d'ailleurs imposé une règle stricte qu'il ne devait absolument pas déroger : "La règle d'or de ma mère : ne pas rentrer trop tard, 'on ne sait jamais'", écrit-il. Et de continuer : "Des jeunes à la posture agressive dealaient jour et nuit en bas de l'immeuble.
L'homme politique de 29 ans poursuit avec des anecdotes qui l'ont profondément marqué. Il raconte dans un premier temps avoir découvert dans son immeuble un homme "qui convulsait au milieu du couloir, une seringue vide à ses côtés". Mais ce n'est pas tout : le député européen rapporte avoir été témoin du meurtre d’un individu au pied de son immeuble après plusieurs coups de feu lorsqu'il déjeunait avec sa mère dans la cuisine. "Nous avons entendu des coups de feu : deux garçons en scooter tiraient sur un troisième, affalé à terre.
Jordan Bardella s'explique sur les origines de son prénom et révèle avoir demandé à sa mère les raisons qui l'ont poussée à choisir "Jordan". Un choix qui lui a valu des "sourires moqueurs" et des "remarques condescendantes". "Avec ton père, nous aurions préféré un prénom italien, mais nous ne sommes pas arrivés à nous mettre d'accord", lui a répondu sa mère. Pour l'homme politique, ce prénom était comme "un marqueur au fer rouge, la carte d'identité de ma classe sociale", qui"raconte [ses] origines et signe [son] appartenance à une décennie", en total opposition face au "monde politique peuplé d’Arthur, de Charles, de François ou de Donatien issus de milieux plus traditionnels".
N'hésitant pas à forcer le trait pour servir le discours de l'extrême droite, il se présente notamment comme un "enfant des classes populaires", qui a vécu "un cauchemar" avec sa mère dans la cité Gabriel-Péri, à Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis.
Bardella indique que son prénom, "Jordan", lui a valu des "sourires moqueurs" et des "remarques condescendantes". Il avait du "mal à l'assumer". Le dauphin de Marine Le Pen raconte:"Plongé dans un monde politique peuplé d'Arthur, de Charles, de François ou de Donatien issus de milieux plus traditionnels, j'étais bien loin des prénoms qui résonnaient à Saint-Denis durant mes vingt premières années."
Aujourd'hui, Jordan Bardella en fait un marqueur politique, la "carte d'identité de (s)a classe sociale", se définissant comme "un enfant des classes populaires et fils de migrants italiens, héritier de la méritocratie républicaine."
Avec son père, Jordan Bardella a pu voyager à Miami ou se voir offrir une Smart lors de sa majorité, comme le racontait Le Monde en juin dernier.
Dans son livre, Jordan Bardella évoque le reste de sa famille. Il revient sur ses origines italiennes, mais aussi sociales: "Mes grands-parents étaient ouvriers", écrit-il, racontant au passage le parcours de ces derniers.
Il évoque notamment Guerino Bardella, cet "ouvrier foreur au sein de grandes entreprises françaises", "tombé amoureux du Maroc qu'il trouva si chaleureux et accueillant qu'il s'y installa une fois à la retraite". Avec son père, Jordan Bardella lui rendait visite une fois par an.
Au cours de séances de pêche, le grand-père évoquait "le passé" et disait, selon les dires du petit-fils: "La France a bien changé. Je ne reconnais plus ce pays. Tout y est désordre, tension, ces agressions, cette sensation de saleté quand on arrive Porte de la Chapelle. La France me manque, mais je n'ai plus envie d'y revenir."
Jordan Bardella questionne: "Combien de nos parents, combien de nos aînés expriment aujourd'hui leur désarroi de ne plus reconnaître cette France tant aimée?"
De son enfance, Jordan Bardella décrit également son quotidien dans la cité Gabriel-Péri où il a grandi avec sa mère. Du moins lorsqu'il n'était pas avec son père, avec lequel il passait des week-ends dans le Val-d'Oise dans les quartiers plus aisés de Montmorency et Deuil-la-Barre, comme on l'apprend également dans Le Monde.
Le presque trentenaire va jusqu'à parler d'un "cauchemar" où la "sérénité était inconnue", dans un récit appuyant les analyses de l'extrême droite."Spectatrice de séries américaines, ma mère me disait souvent que ce quartier était notre 'Bronx à nous', cet arrondissement de New York longtemps réputé pour sa criminalité et ses bâtiments désaffectés", narre-t-il.